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La Nouvelle Lettre du Jeudi
12 juin 2007

Le Proust américain

Le livre de James qui rassemble ses commentaires à propos de ses divers livres est sous-titré « le Proust américain ». Je conçois qu’il fut un temps où il fallait bien situer au lecteur français la qualité de James. Et je ne m’explique cette analogie qu’en me référant à cette ancienne ignorance. Mais à simplement comparer la forme des œuvres de Proust et De James, des différences radicales apparaissent aussitôt. L’un a ramassé dans un roman-cathédrale son corpus tandis que l’autre a disséminé son œuvre à travers un nombre incalculable de nouvelles et plusieurs romans. Les ressemblances existent cependant. Tous deux évoquent les hautes sphères sociales. Chacun démontre un talent exceptionnel de peintre. Des images surgissent sous leur plume qui, sans être tout à fait identiques, sont malgré tout fort semblables. Je songe notamment à l’image de l’objet mobile et réfléchissant caché derrière une meurtrière dont use Proust pour décrire le regard du baron de Charlus. James quant à lui, parle à propos du texte d’une fenêtre derrière laquelle se déplacent des ombres. L’analogie entre les deux images se tient essentiellement dans l’idée de la fenêtre comme médiation entre deux mondes, le monde du lecteur et le monde sémantique. Chez Proust, c’est l’œil du baron qui porte la charge méta-représentative. James est plus explicite puisque l’image désigne directement le texte lui-même, mais il faut préciser que cette image jamesienne surgit dans le contexte d’un commentaire, bref d’un texte qui se propose ouvertement comme étant du texte à propos du texte ; l’intention méta-représentative est donc dévoilée d’emblée. Une conception quasi-identique du texte se manifeste. Le texte en tant que matière graphique est une lucarne, une meurtrière, derrière laquelle les ombres, les reflets du sens, les associations selon James, se déploient. Toute une vie sémantique mystérieuse (mystérieuse car toujours échappant sur quelques points, jamais totalement saisissable) errant dans l’ombre derrière la lucarne des mots.

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