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La Nouvelle Lettre du Jeudi
20 avril 2006

Editorial N°1

Il y a de multiples manières de prolonger la lecture d’un livre que l’on a aimé, une promenade le long d’un sentier perdu en est une ; on peut aussi tenter de récrire l’opus, proposer un regard nouveau, une forme nouvelle, et accéder alors à un plan différent demeuré jusque là inconnu. Le commentaire, la glose, ne sont certainement pas les formes les plus vaines du désir de reprendre ce que l’on a vu et lu. Walter Benjamin ne conseille-t-il pas de recopier le livre si l’on veut le lire bien et mieux saisir le geste de l’écriture ? La Nouvelle Lettre du Jeudi se propose de construire (d’inventer ?) un regard, et, osons-le dire, un “ sujet “, au fil de lectures diverses (le sujet serait la somme de ses lectures). Il n’y a pas de rupture sur le fond avec la première Lettre du Jeudi, du moins, pas d’autre rupture que le temps qui est passé. Les lecteurs de La Lettre première mouture ne seront pas dépaysés par La Lettre nouvelle mouture. La différence entre la première et la deuxième mouture est une différence circonstancielle. Le contexte du sujet écrivant a changé géographiquement, socialement et le contexte artistique a aussi changé. En ce qui concerne le contexte géographique et social, il n’y a qu’à évoquer un village, un horizon de collines, du vent, des pierres, les chasseurs, le fou du village et quelques vieux couples sympathiques. Ce n’est plus la ville et son chaos, c’est l’ermitage. Les volets qui claquent sous les coups de la tramontane sont les compagnons de ces paragraphes. L’on écrit de très loin puisque l’on habite l’un des multiples bouts du monde de ce monde. Quant au contexte de la bande dessinée, il a lui aussi évolué. Le mouvement normal de récupération des formes par le marché est en marche, ce qui fait grincer les dents. Mais là n’est pas l’essentiel. L’essentiel est que la bande dessinée persévère dans sa quête formelle et poétique. C’est donc dans ces nouvelles circonstances que La Lettre reparaît. Il entre une bonne part de vagabondage livresque dans cette entreprise singulière et subjective qui ne se réclame de rien sinon de soi (ce tiers inconnu). L’on va par les livres comme l’on va par les sentiers en suivant l’humeur. Qui, il est vrai, se soucierait de demander ses lettres de créance à un inconnu jouant son Pétrarque ou son Jean-Jacques (“Je ne me compare pas je m’identifie” disait Barthes), inconnu perdu qui plus est aux confins du Larzac sur un plateau désertique et venteux ? En un certain sens, l’on ne parle plus ici au nom d’une communauté, mais on parle au nom d’un soi qui se définit d’abord comme un regard (disons que le regard est le sens qui prédomine (il n’y a pas de regard sans écoute, certes, certes)). Un soi qui a derrière soi un passé de militant de la forme et, de manière plus sporadique, un passé de commentateur-lecteur (le commentaire a toujours été une forme sporadique pour ce soi-là ou plutôt une forme qui répond à une régularité irrégulière, quelque chose qui s’impose, quelque chose d’inévitable (et pourtant, que l’on voudrait éviter par lâcheté ou par paresse)). Les grandes questions cruciales n’ont, elles, pas changé. Qu’est-ce que je regarde ? Comment je regarde ce que je lis ? Comment interpréter les images et le texte ? Un texte peut-il se dessiner ? Un dessin peut-il s’écrire ? La bande dessinée peut-elle se réclamer de la poésie et inversement (on verra que oui) ? Qu’ont à apprendre aux lecteurs les auteurs que l’on nomme classiques (on se dispense de les lire dès lors qu’ils sont ainsi classés) ? Kierkegaard est-il un poète-philosophe ou un philosophe-poète (ce qui change tout, bien entendu)? et enfin, qu’est-ce qu’une forme ?, sont quelques-unes des questions que la Nouvelle Lettre tentera de poser (la liste n’est pas exhaustive). Aux lecteurs qui voudront bien accueillir et lire la prose de La Nouvelle Lettre du Jeudi, il leur est souhaité de cordiales salutations. Olivier Deprez
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